tu étais dans ma valise ( 3 )

Publié le par Nathalie Charman

 

Mardi 11 août

 

Il est 9h.

C’est le matin que tu me manques le plus.

Ce sera dur lorsque je reprendrai le travail.

J’adore t’attendre le matin ; t’envoyer des mots doux, puis entendre ton bonjour matinal, le plus souvent teinté de tendresse, sauf lorsque tu es parti à la recherche des chats où réveillé par eux à 6 heures.

J’aime aussi quand tu es grognon mais pas du tout lorsque tu me prends pour cible.

 

Pour une fois mon sms matinal a été immédiatement distribué. J’entends ton sourire. Tu t’étires où tu te frottes la main contre ta barbe.

 

Je t’aime David

 

Philippe et ce n’est pas un défaut, est de nature très conventionnelle, calme et posé.

Bien que la vie m’ait assagi, je ne peux restée très longtemps en place, fait mille choses en même temps.

Volontairement, je me suis enferrée, dans le manque de fantaisie de notre relation. Nous faisions continuellement la même chose, lorsque nous étions ensemble : concert, vernissage, repérage photo où je l’écoutais parler.

Je me rends compte qu’en neuf mois, je lui ai rarement parlé de moi.

A vrai dire cette relation me convenait.

Lorsqu’il était absent, j’allais voir mes ami(e) s déjanté(e) s




C’est lui qui menait la danse et les rares voit où je me rebellais, je cédais inévitablement.

Je ne supportais plus son alt féminin : j’ai toujours assumé ma bisexualité et jouer les mecs ce n’est vraiment pas mon truc.

A la fin, j’étais devenue une moutonne qui pour avoir la paix avait créé un alt pour le tromper allègrement.

 

Consciemment, je me voilais la face : j’avais l’impression que notre couple fonctionnait bien et me félicitait de ne presque jamais nous disputer.

 

Notre couple ne pouvait qu’exploser lorsque David redeviendrait mon amant.

 

 

 

Je n’ai pu attendre le début d’après midi.

Comme les sms passait, je t’ai téléphoné.

Je crois que tes hurlements dans mon casque ont eu raison de mon ouïe : je t’entends à peine.

Ta voix est si tendre et douce quand tu es loin de moi.

A t’entendre, j’ai la pêche pour la journée.

Je suis pressée de me connecter sur secondlife .Mais j’ai raison, les jours passent vite.

Le temps n’est pas clair aujourd’hui. Je ne sais pas si j’irai à la plage cet après-midi.

Tu me dis de m’occuper. Mais, je connais chaque recoin de cette côte et mes enfants saturent de visiter le moindre lieu qu’ils connaissent par cœur.

 

 

Je ne sais plus, exactement comme cela se déroula : si il y eut le même jour le carnaval de Nice et la demande d’aide pour reconquérir sa princesse à l’occasion de la saint Valentin.

En fait, la chronologie n’a pas vraiment d’importance, dans les histoires d’amour qui finissent.

 

Si je crois me souvenir.

 

Un soir de février, David m’invita à la fête qui suivait le Carnaval de Nice. Je trouvais vite fait, bien fait une tenue. Ma tenue était extrêmement sexy : une danseuse brésilienne, tenue de travail que je n’avais jamais porté.

 

 

 


Parmi les invités, je ne connaissais personne à part Moya, Tim et David.

Je ne sais plus si Philippe et Jil étaient là.

En tout cas, dans cette première partie de soirée, je retrouvais un David facétieux (il nous fit un défilé de son inventaire avec l’ensemble de ses déguisements). Il monopolisait le chat et me draguait gentiment au vu et su de tous.

J’étais un peu étonnée par son comportement. Depuis, plus d’un an, je ne l’avais jamais vu aussi joyeux. Lorsque je le croisais, il restait assez distant.

 

Comme le ciel était gris, en début d’après-midi, nous avons été visité un château fort en cours de rénovation. L’année dernière, il y avait une exposition temporaire sur le thème des princesses. Cette année, c’était sur le thème du rire au Moyen-Âge : pas franchement hilarant.

J’ai déjà préparé le repas de ce soir : des pêches au thon. Cela a intérêt d’être bon sinon tu te vautreras de notre sky à 3500m.

Roman est heureux. Son père lui a offert une épée en bois et un chevalier et son cheval en plastique.

Tu me manques mon Amour

 

 

Je crois que c’est lors de cette soirée, que David me fit part de ses problèmes de couple. Les relations avec son amie étaient de plus en plus conflictuelles et distant. Il était toujours amoureux et voulait reconquérir son cœur, à l’occasion de la saint-Valentin. Je lui donnais des arbres car il avait l’intention de faire quelque chose de très romantique.

Je n’aime pas voir mes amis en peine et par son désarroi, David me touchait énormément car, il restait néanmoins, très positif. De mon coté, je doutais fortement d’une issue heureuse.

 


 

Durant, cette période, nous avions plus ou moins conclu un accord avec Phil : je pouvais être infidèle du moment qu’il ne le sache pas.

Oui, cela peut paraître étrange. Mais, avant Philippe, j’étais quelqu’un d’extrêmement libre au niveau sexuel sur secondlife. J’étais aussi sur secondlife pour m’amuser et réaliser des fantasmes que ma monogamie, ma situation ne me permettaient plus de réaliser dans le réel.

J’ai une imagination débordante et les fantasmes de Phil n’était pas les miens ou plutôt étaient une fraction négligeable des miens. Je fus très longtemps fidèle à Phil. J’essayais plutôt de lui faire partager mes fantasmes. Mais, tous mes essais furent des échecs où se finissaient en crise de jalousie et des engueulades de plusieurs jours. Je n’admettais pas qu’on soit si intéressé par mes amies et qu’on ne puisse tolérer me partager avec d’autres hommes qui bien souvent n’étaient que de simples inconnus.

Nous étions arrivés à ce marché de dupes qui allait de toute façon faire exploser notre couple et rendre malheureux Philippe.

 

Ce soir, David me dit qu’il avait été très longtemps fidèle et que depuis plusieurs semaines ce n’était plus le cas.

 

 

Tu ne mourras pas dans d’affreuses souffrances : tes pêches furent un succès. J’espère que tu as essayé mes œufs mimosa.

 

Nous avions clairement envie l’un de l’autre, je pense. Il me demanda de trouver un endroit tranquille. J’aurai pu le téléporter sur ma sky, mais j’avais promis à Phil de ne jamais y amener d’amant.

J’eus du mal à téléporter David, au jardin d’Eden. Lui qui était jusqu’à présent très volubile restait silencieux. Je comprenais qu’il n’y aurait rien, entre nous, ce soir là. Il était encore très amoureux.

J’espérais pour lui, bien que ne le croyant pas, que la Saint-Valentin, serait heureuse.

Mes sentiments étaient mêlés : heureuse d’avoir retrouvé un ami qui m’avait choisi comme confidente, mais triste de le voir s’accrocher à un amour qui semblait fini.

 

Je retournais à mes petites vies tranquilles sur secondlife et en réel.

 

Rétrospectivement, je me dis que si nous avions été plus loin, ce soir là, les choses auraient été moins douloureuses, pour David, Philippe et moi, par la suite.

 

Il y a deux ans, lors de nos premières rencontres avec David, je n’aurai pu tomber amoureuse. Je n’étais pas prête pour ce sentiment.

Ce soir là, David m’avait énormément touché. Je me connais très bien et il aurait suffit de cette étincelle pour je sois amoureuse de David.

Je ne dis pas que David serait tombé amoureux de moi, puisqu’il était encore amoureux d’une autre. Mais lors de la rupture, j’aurais pu le soutenir et il aurait moins longtemps souffert et n’aurait pas abandonné son avatar pendant plusieurs mois.

 

C’est peut-être prétentieux ce que j’avance, mais je le pense sincèrement : à ce moment là, nous étions déjà fait pour être ensemble.

De plus, en février, je ne savais pas encore que j’allais repasser de nouveau sur le billard : j’aurais été plus franche avec Philippe et moins centrée sur mes peurs et sur mon nombril qu’on allait me refaire. J’aurais moins tardé à tout dire à Philippe et même si la rupture aurait été douloureuse, elle l’aurait été peut-être moins.

 

Je retournais donc à la tranquillité de ma petite vie sur secondlife. Je ne trouvais plus grand intérêt au jardin et réfléchissais à passer la main. J’avais envie de créer autre chose et la plage des amoureux se concrétisait sur un terrain. J’avais remarqué un nombre important de visiteurs, nullement intéressée par les œuvres mais par les parties plus détentes du jardin

 

Hormis, lorsque j’étais avec Philippe et mes amis, je m’ennuyais beaucoup. Certes, j’avais créé un nouvel avatar, uniquement consacré au sexe, mais les temps où j’étais seule chez moi étaient relativement limités.

 

J’avais beaucoup de boulot dans le réel et je mettais sur le compte de l’âge et de mes opérations ma fatigue.

J’ai toujours aimé mon travail. En plus de 20 ans de pratique, je me connais bien et je suis plus efficace noyée sous la surcharge et l’urgence. C’est dans la rapidité qu je réfléchis le mieux et que j’excelle.

Là, je rentrais chez moi, complètement vidée et dormais comme un bébé alors que je suis insomniaque. Je restais au travail sagement derrière mon bureau au lieu de courir d’un étage à un autre. Mes collègues se moquaient gentiment de ma tête et soupçonnaient ma chef d’avoir collé de la glu sur ma chaise et regrettaient vivement qu’elle n’en ait pas fait autant avec ma bouche.

 

Mon plus grand handicap, c’est en fait d’être insensible à la douleur. Cela peut être pratique, lorsqu’on est fâché comme moi avec les meubles et surtout les fours : maladroite et surtout très speed, j’ai tendance à me cogner dans les meubles et de me brûler très fréquemment. Généralement, je réalise qu’il y a eu rencontre involontaire lorsque le bleu est là depuis plusieurs heures.

Ce n’est plus un avantage, dans le cas de diverticulose. Mon premier chirurgien m’a présenté à ses internes lors de sa première visite post-opératoire comme une héroïne : « cette femme est en béton ». A l’époque, j’étais sous morphine et j’ai cru halluciner. Sortie de l’hôpital, je me renseignais sur internet et auprès de copines qui avaient eu la même maladie : les crises de diverticuloses sont extrêmement douloureuses et de fait diagnostiquées et traitées, bien avant la perforation. Dans mon cas, j’avais depuis plusieurs années, de temps en temps, de légères douleurs abdominales que je mettais sur le compte du stress et d’une mauvaise alimentation.

 

J’aurais dû me méfier, entre autre, de cette fatigue, d’autant plus inexpliquée qu’avec mon 80% et mes journées de congés à récupérer, je ne travaillais jamais plus que trois jours par semaine.

 

C’est dans ce contexte d’ennui et de fatigue que David, sous l’apparence d’un alt, se rappela à mes bons souvenirs.

 

 

Il est plus de 1h30 du matin

Je me fume ma dernière cigarette de la journée (je sais fumer, c’est mal : mais tu as une chérie qui a tout les vices et ce n’est pas sans te déplaire, si j’ai bien compris) et je vais me coucher.

Je suis pressée d’être à demain pour entendre ta voix et ton rire.






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